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Présentation du bulletin
Nous persistons et signons : nous sommes entrés dans une
nouvelle période de crise et de guerre

Ce que nous disions à propos de la nouvelle période ouverte avec le 11 septembre 2001, réaffirmé dans plusieurs bulletins et notamment dans le précédent (n°20) se confirme chaque jour un peu plus. Nous sommes bien effectivement dans la configuration d’une aggravation de la crise économique et cette dernière pousse de plus en plus la bourgeoisie vers la guerre. Une vision superficielle de la situation actuelle, au niveau des rivalités impérialistes majeures, tend à mettre en avant l'idée selon laquelle la superpuissance américaine, depuis l'effondrement de l'URSS, n'a en face d'elle que des "nains" ; cette appréciation concerne notamment l'Allemagne et la France qui, pourtant, aujourd'hui, osent s'opposer de plus en plus ouvertement à la politique hégémonique des Etats-Unis dans le monde et cherchent ainsi à se présenter comme un autre pôle de regroupement impérialiste. Cette opposition entre les Etats-Unis et des "nains" serait exacte si l'on se contentait de se baser sur le seul plan des moyens militaires. Mais il est clair depuis longtemps, et la réalité actuelle le confirme, que la force militaire brute n’est pas tout, ni même le seul facteur déterminant. En effet, la guerre demeure bien « le prolongement, par d’autres moyens, de la politique » ce qu’ont toujours affirmé les marxistes et certains bourgeois comme le théoricien de la guerre moderne (au XIX° siècle) Von Clausewitz. L'influence économique, politique et diplomatique des impérialistes européens s’avère, pour le moins, aussi redoutable que celle de la canonnière américaine. Depuis que l’Allemagne et la France ont manifesté avec force leur "indépendance impérialiste", un pavé a été jeté dans la mare et cela a permis à de nombreux Etats de moindre importance de se trouver de bonnes raisons pour ne plus marcher derrière les Etats-Unis. Ils rendent ainsi la politique américaine de plus en plus difficile.

La guerre en tant que politique ne se réduit pas à des « wargames » électroniques, soi–disant faciles et « propres ». En Afghanistan comme en Irak, les Etats-Unis ont beau montrer leur force en envoyant les bombes les plus sophistiquées et les plus destructrices, il leur faut également montrer leur capacité à occuper le terrain et à le contrôler. Et là, c’est autre chose. L’occupation et le contrôle de ces zones leur est manifestement plus difficile que l'affrontement guerrier et très (trop?) coûteuse en hommes et en argent, sans parler du "danger intérieur" (les réactions sociales aux Etats-Unis même) que cette politique ne manque pas de réveiller. Jusqu'en 2002, les Etats-Unis arrivaient encore à faire faire une partie des basses besognes à leurs "alliés" de l’OTAN ; ce n’est plus le cas aujourd’hui. Ce à quoi on assiste aujourd'hui en Irak, c'est qu'ils ont le plus grand mal à trouver quelques maigres bataillons non–américains pour venir remplacer leurs troupes. Ainsi, la nouvelle doctrine militaire US, qui prétend s'appuyer sur une armée capable d’être « projetée sur plusieurs théâtres d’opération à la fois » dans le monde, est en défaut. La situation que connaissent actuellement les Etats-Unis rappelle étrangement celle de la  “Grande armée” de Napoléon incapable de résoudre le problème de la guérilla en Espagne au début du XIX° siècle.

De plus, cette politique de la guerre "post-moderne", comme ils l'appellent, s'avère être un gouffre sans fond : pour les seuls Etats-Unis, la simple occupation de l'Irak a un coût mensuel de 3,9 milliards de dollars et leur budget militaire global se monte à 400 milliards de dollars alors que leur endettement en 2001 s'élève à 31% du PIB (contre 26% pour l’UE). Cela veut dire augmenter les charges, les impôts, les taxes et donc "étrangler" les prolétaires. Mais les Etats capitalistes n’ont plus le choix, ils ne survivront dans la crise sans fin qui les touche que par la guerre impérialiste. C’est la seule solution qu'a le capitalisme pour continuer à tourner, même si c'est de plus en plus mal et même si c'est en propageant la barbarie à travers le monde.
Sur son chemin il va inévitablement rencontrer une classe ouvrière qui est, comme on l'a vu dans la vague de luttes qui a commencé en Europe (notamment en France) au printemps dernier, en train de restaurer ses capacités de lutte et qui va réagir face aux attaques qui ne manqueront pas de survenir.


Le camp prolétarien, dans sa grande majorité, partage globalement la même compréhension de cette situation ainsi que le sens de ses responsabilités face à celle-ci. Nous ne citerons ici que le PCI–Prolétaire qui, tout dernièrement, titrait à la Une de son journal : « Après les grèves du printemps, se préparer aux luttes futures !» (Le Prolétaire n° 468 août/septembre 2003). Dans ce même numéro, le PCI affirme : « … le mouvement a agi également de révélateur pour les positions d’un groupe qui s’affirme être un représentant de la Gauche communiste, le CCI. ». Malheureusement, nous ne pouvons qu'être d’accord avec cette appréciation : le mouvement a effectivement servi de révélateur pour ce qui concerne le CCI, seule organisation qui lui a tourné le dos.

Aucune organisation révolutionnaire n'est à l'abri d'une erreur, d'une mauvaise appréciation d'une situation et donc d'une politique pour le moins inadéquate. Mais, dans le cas du CCI actuel, ce n’est ni un hasard ni une erreur passagère. C'est une conséquence directe de sa très grave dérive politique. Nous renvoyons nos lecteurs à la résolution sur la situation internationale adoptée par le XV° Congrès de cette organisation ainsi qu'au texte–critique sur celle–ci que nous publions dans ce bulletin. Comme tout le monde pourra le constater, le CCI met aujourd'hui en avant une « troisième voie » (la destruction de l'humanité sans guerre mondiale et sans lutte des classes) au niveau de la perspective historique, laquelle est antinomique avec l’alternative « guerre ou révolution ». Même s'il continue à se revendiquer de cette alternative, ce n'est plus qu'une phrase creuse. Cette "troisième voie" est celle de la défaite sans combat pour la classe ouvrière, celle qui l’amène à abandonner le terrain de la lutte. Au bout du compte, le CCI rejoint la fameuse "troisième voie" des révisionnistes et des opportunistes de la social-démocratie qui appelaient les ouvriers à ne pas combattre pour la révolution.

Le glissement du CCI sur le terrain de l’opportunisme dans l’intervention au sein de la lutte de classe est déjà une réalité tangible mais il ne peut que s'aggraver du fait de la politique sectaire que développe cette organisation. Jusqu’à ces dernières années, le CCI recherchait et développait le débat, la discussion et la polémique avec les autres groupes du camp prolétarien. Aujourd’hui, il développe une politique opposée et va même jusqu'à la justifier. Dans la même résolution, tout le monde peut se rendre compte à quel point il se montre dédaigneux en direction du milieu politique prolétarien. Concernant notamment les groupes de la Gauche communiste, il lance avec condescendance : "En fait, loin de leur donner une vision claire de la situation où se trouve la classe ouvrière, la période de décomposition, nouvelle et sans précédent (au regard du marxisme – NDLR), a produit chez eux un réel désarroi théorique." Et l'avenir qu'il leur prédit est quasiment mortel : "… la minorité révolutionnaire elle–même risque d'être terrassée et détruite par l'ambiance putride qui l'entoure et qui pénètre dans ses rangs..." Ainsi, la source de vitalité que représente pour le prolétariat la discussion, la confrontation d'idées et l'autocritique et qui auraient pu servir à enrayer son glissement, le CCI n'en veut pas. Son isolement volontaire va donc l’enfoncer davantage.

A Paris, le samedi 20 septembre, s’est tenue une réunion des lecteurs du PCI (Le Prolétaire) où étaient présents notamment des représentants de l’autre PCI (Programma Comunista) en plus d'une délégation de notre fraction. Le CCI était absent alors que, jusqu’en 2000, il n’aurait jamais manqué une de ces réunions, organisées par un autre groupe politique, qui attirent souvent des membres des autres tendances politiques ; et c’est cela qui fait de ces réunions, notamment parisiennes, des lieux de discussion importants. Il est important de signaler qu'au cours de cette réunion du 20 septembre nos camarades ont demandé solennellement, au PCI et à tous les présents, si leur présence était acceptée, étant donné que le CCI actuel a dénoncé publiquement tous les membres de notre fraction comme "auxiliaires de la police". Après un court instant d'étonnement suivi d'un grand éclat de rire (1), le camarade du PCI–Le Prolétaire s'est écrié : «Quel aveu de faiblesse de la part du CCI !», puis les membres des deux organisations présentes nous ont donné leur accord et leur confiance pour participer à cette réunion qui a été très fructueuse puisque chacun a pu donner son avis sur les leçons des dernières luttes de la classe ouvrière du printemps. Cette discussion a montré un accord général sur les questions essentielles de l’analyse de la situation et sur ses perspectives, même si des tonalités différentes se sont exprimées parmi les participants. Le PCI a insisté sur l’ampleur de ce mouvement authentiquement ouvrier et a rappelé les caractéristiques qu’il en avait déjà dégagées “à chaud” en juin et qui se sont confirmées. Comme notre fraction, il a souligné également les limites du mouvement tout en reconnaissant que ces dernières sont normales du fait qu’il s'agit d'un mouvement exprimant la reprise de la lutte de classe et qui ne pouvait donc pas aller au-delà. La lutte des intermittents du spectacle a été comprise comme prolétarienne et saluée en tant que telle. Les perspectives de développement des luttes sont devant nous du fait que la classe capitaliste va devoir porter de nouvelles attaques massives et frontales contre la classe ouvrière (licenciements massifs et prochainement, en France, la sécurité sociale,..) et que la crise économique (ainsi que les politiques militaristes) ne lui laisse quasiment aucune marge de manœuvre. Nous ne développerons pas ici nos réponses car elles sont contenues dans différents textes de ce bulletin.

Mais ce que nous tenons à souligner ici c’est la volonté, qui s'est clairement exprimée dans cette réunion de la part des organisations présentes, de mener et développer un réel débat politique dans le camp prolétarien. Nous saluons cette attitude et nous ferons tout pour qu'elle continue à se développer. Dans ce sens, plusieurs réflexions du représentant du PCI sont à souligner, par exemple quand il a déclaré qu’il nous fallait être attentifs au vocabulaire employé dans les polémiques et discussions dans la mesure où il s’avère souvent que « nous traitons, peut être, des mêmes idées et positions politiques avec des mots différents ». Par ailleurs, il a clairement indiqué que, pour son organisation, le seul moyen de tenter de répondre au désastre créé par la crise actuelle du CCI est de «faire des polémiques sur les positions politiques en question ».

D'ailleurs, dans ce bulletin, nous faisons état de courriers que nous avons reçu de la part de lecteurs intéressés par la discussion et l’approfondissement sur le mouvement de grèves du printemps en France et sur la question de l’intervention des révolutionnaires dans les luttes. On est contraint de constater que se multiplient les critiques par rapport aux actuelles analyses et interventions du CCI ainsi que les incompréhensions par rapport à la politique qu'il mène face à sa crise organisationnelle.

Le camp prolétarien devant une responsabilité cruciale

La logique dramatique dans laquelle le CCI est engagé, a franchi, au fil des derniers mois, différentes étapes. Nous nous sommes efforcés de les mettre en lumière au fur et à mesure, de montrer que la dérive constatée conduisait notre organisation vers l’opportunisme. Les faits montrent que nous ne nous étions malheureusement pas trompés.
Aujourd’hui le CCI montre, par sa pratique, par le caractère aberrant de son analyse de la situation, par sa désertion des luttes de la classe, par sa coupure voulue et affirmée du débat avec les autres expressions prolétariennes, qu’il patauge en plein opportunisme. Ses conceptions "nouvelles" sur le devenir prévisible de l’humanité à travers sa "troisième voie" ou, selon ses mots la "troisième possibilité", montre que la dérive tend à le mener de l’opportunisme au révisionnisme.

Mais nous voulons croire que rien n’est définitif. Nous alertons l’ensemble des organisations et des individus isolés du camp prolétarien à ne pas laisser se poursuivre jusqu’à son terme cette trajectoire catastrophique.
Nous tous avons la responsabilité de mener le combat pour sauver, sinon cette organisation en tant que telle, au moins le maximum de ses militants ainsi que, de notre point de vue, le passé du CCI, son apport à la réflexion politique au sein de la classe ouvrière depuis plus de 30 ans.
Le débat au sein du camp prolétarien doit aussi assumer cette tâche. La fraction ne l’abandonnera pas !

La Fraction, 5 octobre 2003


1. Le CCI est, maintenant et malheureusement, la risée de tout le camp prolétarien. Quoiqu’il en soit, c’est une “nouvelle défaite politique” du CCI, de sa politique d’exclusion de la Fraction et des méthodes qui s'appuie sur une vision policière de l’histoire et réduisent, comme l'a fait le stalinisme, les désaccords politiques à des manifestations de l'ennemi de classe.


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