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L'INTERVENTION DES INTERNATIONALISTES DANS LA LUTTE
CONTRE LE "CPE" EN FRANCE (mars 2006)

Jusqu'au 18 mars

Le BIPR publie un tract pour la manifestation du 18 mars qui défend correctement que "le gouvernement continue ses attaques contre tous les travailleurs" et qu'il s'agit donc d'une lutte de toute la classe ouvrière. Contrairement au CCI qui voit les syndicats "humiliés et débordés" (cf. ci-après), le BIPR comprend très bien la réalité du rapport de forces et son évolution, et dénonce en conséquence le sale travail des syndicats :"les syndicats quant à eux, ont décidé une mobilisation à minima : pas d’appels sur les lieux de travail, ni tracts ni réunion d’information, encore moins d’Assemblées Générales ! Alors que le gouvernement cherchait à aller vite et à passer en force, les syndicats ont mis des semaines avant de déposer les préavis de grève qui n’ont pas été relayés sur le terrain. C’est que la logique syndicale est toujours de défendre l’entreprise, la nation, en concurrence avec d’autres entreprises, d’autres nations"

Les camarades mettent très clairement en avant la nécessité d'extension de la lutte à ce moment là :

"Le CPE, comme les suppressions d’emploi et les autres attaques contre nous nécessitent une authentique riposte ouvrière. Il faut nous organiser à partir de la base, élargir le mouvement le plus possible en allant à la rencontre des autres étudiants, des autres travailleurs, constituer sur les lieux de travail des comités de défense et d’organisation autonomes, basés sur des Assemblées Générales et des délégués révocables (...).

Le mot d'ordre final, et donc l'orientation qui est donnée, "pour une riposte des travailleurs, auto-organisons nos luttes !", ne nous semble pas des plus précises. Telle qu'elle est formulée elle peut être ambiguë à ce moment-là. Néanmoins, loin d'être une apologie des assemblées étudiantes en soi, ce mot d'ordre d'auto-organisation s'adresse à la partie salariée de la classe ouvrière et donc s'inscrit dans un appel direct à l'extension, à l'entrée en lutte et en grève.

Enfin, il faut saluer le fait que le BIPR est capable de se mobiliser à cette occasion et envoie une délégation internationale participer à la manifestation parisienne. En cette occasion, nous intervenons à ses côtés et, après avoir distribué notre propre tract, nous participons à la diffusion de sa presse.

Le PCI-Le Prolétaire publie aussi un tract daté du 23 mars. Pour lui aussi, "l'attaque en cours (...) s'inscrit dans une offensive bourgeoise qui se poursuit depuis des années sous des formes diverses, quel que soit le gouvernement (...). Cette offensive se déroule dans tous les pays - et elle provoque de plus en plus les réactions de lutte des prolétaires". Après une dénonciation des "directions syndicales ou les partis de gauche, ces défenseurs fanatiques de l'ordre bourgeois qui ont fait échouer tous les mouvements qu'ils ont pu diriger", le PCInt défend une orientation de lutte, "la prise en main", c'est-à-dire l'organisation de l'extension à tous les secteurs du prolétariat :

"Pour résister, il n'y a pas d'autre choix que de prendre ses luttes en main, que de s'organiser pour la lutte indépendamment de toutes les organisations réformistes et collaborationnistes, en adoptant des méthodes de lutte véritable : unions de tous les prolétaires, jeunes ou vieux, travailleurs, précaires ou chômeurs, français ou étrangers, par dessus toutes les différences de corporation, d'entreprise, de sexe ou de race ; grèves illimitées dirigées par des comités de grève élus et révocables, avec occupation, blocages, piquets de grève, etc., recherche et organisation de la solidarité avec les autres prolétaires et de l'extension de la lutte. Ce retour à la lutte de classe prolétarienne est une nécessité vitale pour faire échec aux attaques bourgeoises. Elle est aussi la condition pour passer demain de la défense à l'attaque, c'est-à-dire à la lutte pour la révolution communiste internationale par laquelle les prolétaires de tous les pays, guidés par leur parti communiste mondial, abattront à jamais le sanglant mode de production capitaliste responsable d'innombrables hécatombes".

Outre ces tracts, et parmi une multitude d'autres interventions, nous en avons relevé une signée Pour un regroupement de la Gauche communiste internationaliste. Ce tract daté du 18 mars, bien que centré sur une dénonciation générale et historique du capitalisme, titre tout à fait correctement que "Le capitalisme, c'est toujours plus de précarité, luttons tous ensemble derrière la classe ouvrière !".

Pour notre part, nous intervenons comme fraction dans un tract daté du 18 (à tort puisqu'il est rédigé le 16 et diffusé le 18) qui appelle à "Elargir la lutte à toute la classe ouvrière !" (nous le reproduisons dans ce bulletin) et qui s'essaie à donner des orientations concrètes et immédiates aux étudiants en lutte mais surtout à l'ensemble de la classe ouvrière dans les entreprises. Ici, il nous appartient de porter une critique à notre intervention par tract : pour défendre le mot-d'ordre d'extension, qui était vital à cette lutte depuis son départ, nous aurions dû intervenir plus tôt par ce moyen d'intervention massive. Néanmoins, nos militants sont actifs sur leur lieu de travail, dans les assemblées générales qui sont convoquées pour la préparation de la manifestation du 7 mars (en fait déjà lors de celle du 7 février) sur les mêmes axes d'intervention, c'est-à-dire en appelant à faire grève lors des journées d'action afin de participer aux manifestations, bien qu'organisées par les syndicats ; si possible d'y aller en cortège pour rencontrer les ouvriers des autres secteurs et entreprises, discuter avec eux et participer ainsi au développement et à l'unification de la lutte ; en clair, tout faire pour transformer des journées d'action syndicales défouloirs et leurs manifestations-balades en véritables moments du combat ouvrier.

L'intervention du CCI

Durant cette première période, seul le CCI parmi les groupes communistes, est intervenu dès le 7 mars par un tract (daté du 6) qui, malgré les critiques importantes de divers ordres que nous pourrions y porter, défend correctement que cette lutte est une lutte du prolétariat, qu'elle a donc un caractère de classe. Dans ce tract, certes de manière trop générale et abstraite à notre goût, le CCI défend que la perspective pour les étudiants est de ne pas rester isolés et appelle les salariés à se mobiliser. C'est alors correct et s'inscrit dans le sens du développement et de l'élargissement de la lutte.

Par la suite, le "nouveau" CCI tombe dans un emballement et un enthousiasme assez sidérant par rapport au mouvement étudiant et reprend à son compte tous les thèmes que les médias bourgeois développent... contre la classe ouvrière : en particulier sur la question de la violence et de la répression d'une part, et d'autre part en participant d'isoler les étudiants en ne cessant d'exalter l'exemplarité de leur lutte et surtout de leur "auto-organisation". Mentionnons seulement ici qu'il publie, le 11 mars, un tract sur Internet (a-t--il réellement été diffusé par les militants ?) intitulé "les CRS à la Sorbonne : non à la répression des enfants de la classe ouvrière !" qui n'avance comme orientation politique que "Solidarité avec les étudiants", "A bas la répression contre les enfants de la classe ouvrière", "Non à la dispersion de nos forces" et "Construisons un front compact et uni de toute la classe ouvrière !".

Cet emballement activiste et gauchiste se confirme dans l'exposé présenté à la réunion "publique" de Paris ce même 11 mars et qui montre qu'il ne s'agit pas d'un dérapage isolé; mais bel et bien d'une orientation générale de l'organisation. Nous renvoyons le lecteur à cet exposé dont le style et le contenu sont assez délirants et ont dû surprendre plus d'un lecteur et plus d'un... membre du CCI actuel (en son for intérieur). Nous n'avons pas la place ici de revenir sur toutes les énormités politiques écrites par cette organisation durant cette mobilisation.

Puis, un autre tract (daté le 16 mars), c'est-à-dire au moment le plus "crucial" de cette lutte, commence par participer d'enfermer les étudiants en glorifiant leur lutte avec des accents que l'on peut qualifier au mieux de "conseillistes", qui cachent difficilement l'idéologie démocratique et petite-bourgeoise : "la solidarité et le courage des étudiants et lycéens en lutte sont exemplaires (!). La liberté d'expression et la culture du débat qu'on voit dans les assemblées générales massives des étudiants, des décisions et des motions visant à élargir, approfondir et organiser le mouvement adoptées à main levée après discussion, l'élection de délégués responsables devant l'assemblée, c'est la véritable "démocratie", c'est-à-dire la prise en main directe et responsable par les étudiants de leur lutte !".

Cet apologie de la lutte dans les universités, qui pourtant n'a pas la force d'imposer l'extension contre les sabotages des syndicats étudiants et des gauchistes, tourne le dos aux besoins réels de la lutte, à la nécessité impérieuse de son élargissement par l'entrée en lutte ouverte des principales fractions de la classe ouvrière. Elle enferme les étudiants dans l'autosatisfaction petite-bourgeoise, dans "l'autosuffisance" - leur lutte n'est-elle pas exemplaire selon le CCI actuel ? (comme d'ailleurs ne cessent de le mettre en évidence les médias bourgeois et les syndicats étudiants) - et les écarte du combat politique pour l'extension, contre les sabotages syndicaux.

Sous un langage qui peut sembler pousser à l'extension, le tract tourne en fait le dos à celle-ci et finit sur un terrain ouvertement gauchiste. Il appelle "tous les travailleurs, ouvriers, précaires, chômeurs, retraités à engager immédiatement un mouvement de protestation générale [nous soulignons] contre cet ordre (...), à faire entendre leur voix, à participer massivement et dans le calme (...), à manifester tous unis, sans violence mais avec détermination le 18 mars [souligné dans le tract et relayant ainsi la propagande bourgeoise sur la violence] contre le travail précaire et le chômage, contre la répression, contre les atteintes au droit de grève. Le droit de grève, la liberté d'expression, sont des acquis des luttes de la classe ouvrière (...). Non au blocage de la vérité ! Non à la liquidation des acquis des luttes de la classe ouvrière ! Non à la répression contre les étudiants et enfants de travailleurs !". Défense du "droit de grève", de la "liberté d'expression", "Non au blocage de la vérité" (?), voilà des mots d'ordre typiquement gauchistes et bourgeois.

A aucun moment, le tract n'appelle à la réelle extension de la lutte, à la réelle entrée en lutte, particulièrement à la grève, de l'ensemble du prolétariat, véritable enjeu et ligne de démarcation entre les classes à ce moment. Les appels et mots d'ordre qu'il lance, sont les mêmes que les gauchistes et reviennent concrètement à ramener l'ensemble de la classe ouvrière, étudiants, salariés, retraités, chômeurs, sur le terrain et derrière les "perspectives" que les syndicats mettent en avant alors : participer massivement et pacifiquement aux manifestations comme unique expression de la solidarité et de l'extension... derrière les syndicats et le PS.

A ce moment, et contrairement au premier tract du 6 mars, l'intervention du CCI va dans le même sens que celle des gauchistes et des syndicats. Sur la barricade de classe, en terme de mots d'ordre, d'orientation et de perspective, elle se trouve alors clairement du côté bourgeois.

Enfin, il diffuse à la manifestation du 18 mars un supplément de Révolution internationale intitulé Salut aux nouvelles générations de la classe ouvrière qui ne donne pas d'orientation particulière, mais qui par contre, alors même que les quelques tentatives minoritaires d'extension réelles sont en train de s'éteindre, présente une analyse et un bilan extraordinaire, pour ne pas dire délirant, de ce mouvement et en particulier une apologie incroyable de l'auto-organisation. On y apprend, incrédules que "du 8 au 18 mars, « dix jours vont ébranler le monde » de la bourgeoise française" (1); que les syndicats "n'ont pas prévu qu'ils seraient massivement débordés (...), humiliés (et même) "démasqués" ; que leurs militants étaient "complètement déboussolés" ; que "grâce aux nouvelles générations, la classe ouvrière a réussi à briser le « blocage» de la solidarité par les syndicats (et que) quels que soient les scénarios de l'issue du mouvement, cette lutte (...) est déjà une victoire" (souligné dans le texte). Et le pompon pour tout marxiste : "les enfants de la classe ouvrière qui sont aux avant-postes du mouvement des étudiants sont les seuls qui puissent ouvrir une perspective à toute la classe ouvrière" (cette fois, c'est nous qui soulignons).

Inutile de dire ici que le CCI est sans doute le seul à avoir vu des syndicalistes déboussolés et humiliés et qu'au contraire, ce qui nous a frappé, en particulier sur les lieux de travail comme dans les manifestations, c'était la sérénité et le calme des militants syndicaux qui exprimaient ainsi la maîtrise globale des événements par les syndicats (nous pourrions en donner de multiples exemples).

Ce supplément peut aussi sembler contredire l'orientation d'enfermement sur les étudiants que présente le tract du 16 : "Les étudiants ont parfaitement compris que l'issue de leur combat est entre les mains des travailleurs (...). Cette dynamique vers l'extension du mouvement, vers la grève de masse, a démarré dès le début de la mobilisation des étudiants qui ont envoyé partout, aux quatre coins du pays, des délégations massives vers les entreprises...". En premier lieu, on ne sait pas où le CCI a pu voir l'envoi de délégations "aux quatre coins du pays". Sauf à faire référence aux multiples rencontres qui ont eu lieu entre les dirigeants des grandes centrales syndicales et des syndicats d'étudiants (qui n'ont rien à voir avec la classe ouvrière), l'envoi de délégation est resté extrêmement minoritaire et réduit à quelques lieux. Mais sans doute, fallait-il donner quelques "raisons" à l'apologie enthousiaste et a-critique de la lutte dans les universités.

Mais dès que le CCI s'essaie à donner des éléments concrets sur cette "extension du mouvement, vers la grève de masse", celle-ci est ouvertement et scandaleusement ridiculisée, abandonnée, trahie et liquidée : les fameuses "délégations massives" "se sont heurtées au «blocage» syndical : les travailleurs sont restés enfermés dans leurs entreprises sans possibilité de discuter avec les délégations d'étudiants. Les «petits sioux» des facs de Paris ont dû imaginer un autre moyen de contourner le barrage syndical". Ici, on est censé apprendre comment, par quels moyens, selon le CCI actuel, les étudiants ont assumé un affrontement politique ouvert, frontal, pour l'extension réelle, et contre le sabotage syndical : "Pour mobiliser les travailleurs, les étudiants ont fait preuve d'une riche imagination. Ainsi à Censier, ils ont fabriqué une urne en carton appelé «boite à idée» [sic !]. Dans certaines universités (...), ils ont eu aussi l'idée de bavarder tranquillement dans la rue, de s'adresser aux passants (...). Ils ont demandé à tous les «badauds» s'ils avaient des idées à leur proposer car «toutes les idées sont bonnes». (...) Les étudiants ont pu récolter dans leur «urne» des idées qu'ils ont mises en pratique [rien n'est dit sur ce qu'étaient ces idées sinon] (celles qui vont dans le sens du renforcement du mouvement) et les «mauvaises idées» (...). Les étudiants (...) ont ouvert les amphithéâtres (...) aux salariés et mêmes à des retraités. Ils leur ont demandé de leur transmettre leur expérience du monde du travail. Ils avaient soif d'apprendre des vieilles générations. Et les «vieux» avaient soif d'apprendre des «jeunes». Tandis que les «jeunes» gagnaient en maturité, les «vieux» étaient en train de rajeunir ! C'est cette osmose entre toutes les générations de la classe ouvrière qui a donné une impulsion nouvelle au mouvement".

Voilà ce qu'écrit le CCI, "une impulsion nouvelle", au moment même où la bourgeoisie renforce sa maîtrise du mouvement et où elle réussit à en évacuer toute potentialités de classe.

Nous aurions encore beaucoup à dire sur cette intervention mais la place nous fait défaut et surtout nous avons peur de perdre le lecteur dans un océan de confusion, d'opportunisme, de stupidités, et de niaiseries aussi.

Les interventions après le 18 mars

Le 18 exprime un moment de fermeture de toute possibilité de développement réel, extension, unification, de la lutte et les journées d'action qui suivent, 28 mars et 4 avril, ne pourront être autre chose qu'un remake du 18 jusqu'à ce que la combativité retombe faute de perspective. La maîtrise globale de la bourgeoisie se renforce tout au long de cette période. Les syndicats repoussent à une échéance relativement lointaine la "journée d'action" suivante. Cela manifeste que la dynamique vers l'extension de la part des étudiants n'est plus un danger et que persiste néanmoins une possibilité d'éclatement de luttes ouvrières ici ou là qui viendrait relancer la dynamique de lutte en offrant une perspective à son tour.

Durant cette période, nous continuons à diffuser notre tract jusqu'au 28 mars essentiellement en direction des entreprises dans la mesure où une certaine combativité sur la base de revendications propres tend à s'affirmer (EDF - la compagnie étatique d'électricité, à la Poste où deux jours de grèves touchent les guichets des bureaux de poste parisien ainsi que les facteurs...). Même si peu de probabilités existent que ces mobilisations puissent réellement prendre le relais des étudiants et offrir une alternative, voire une perspective d'élargissement, nous estimons que notre tract est toujours valable ne serait-ce qu'en terme de "leçon" si ce n'est plus en terme d'orientation immédiate.

Le BIPR publie un tract daté du 2 avril dans lequel il reprend les axes essentiels de son intervention précédente. "Le CPE après le CNE, est une nouvelle attaque contre tous les travailleurs. (...) La politique qu’ils [les gouvernements] conduisent correspond bien aux besoins exprimés par leur maître : le capital (...). C’est la même politique qui est suivie par la ‘Gauche’ au pouvoir en Angleterre ou par la coalition ‘Droite-Gauche’ en Allemagne. En Allemagne les travailleurs des services publics sont en grève depuis plusieurs semaines, en Angleterre, un million de travailleurs étaient dans la rue mardi 28 (le jour même où en France, nous étions si nombreux dans la rue). Nous ne sommes donc pas seuls : nous sommes une classe en lutte contre une autre classe et son pouvoir".

Prenant acte de la maîtrise de la lutte par les syndicats et les partis de gauche, le BIPR comprend un élément essentiel du rapport de forces entre les classes, à savoir que : "les syndicats sont remis en selle". C'est ce qui lui permet d'avancer une orientation, certes générale, mais globalement juste et qui se situe dans le sens des intérêts et des nécessités immédiates du combat de classe, sans tomber dans, ni reprendre les thèmes idéologiques et propagandistes de la bourgeoisie (les violences, l'exaltation de l'auto-organisation étudiante, etc.). "Pour réellement bloquer les contre-réformes de la classe dirigeante, il nous faut nous organiser en dehors des logiques syndicales. Élargir le mouvement à tous les secteurs de notre classe sur la base des véritables revendications des travailleurs et des travailleuses. Mener des luttes offensives qui nous unissent au-delà des fausses divisions de race, de nationalité ou de religion."

A l'évidence, le BIPR se trouve du "bon côté de la barricade" dans le combat.

Pour la manifestation du 28 mars (plus de 2 millions de participants) et depuis, le CCI n'intervient plus par tract. Il est vrai que son enthousiasme pour la jeunesse étudiante, pour ses "dix jours qui ont ébranlé le monde", n'a pu que retomber brutalement face à la réalité. Il publie un article dans Révolution internationale n°367 d'avril qu'il diffuse donc dans la manifestation du 4 avril avec son supplément. L'article qui est une sorte de bilan, donne pour raison première et principale à l'échec du mouvement "la stratégie du pourrissement par la violence" du gouvernement relayé par les médias (alors même que cet élément n'a joué qu'un rôle tout à fait secondaire dans les différents moments de la mobilisation). Ce n'est que comme ultime facteur que l'article dénonce les syndicats. Mais là encore, l'essentiel de la dénonciation se porte sur le fait que "les rares assemblées générales organisées par les syndicats [dans les entreprises...] n'ont rien à voir avec ce que nous avons connu dans les facultés" et non sur l'orientation politique de ces assemblées qu'elles soient "parfaitement démocratiques" ou non.

Depuis, il a publié un certain nombre de textes, des thèses mêmes, sur lesquels nous nous réservons de revenir dans le futur si le besoin s'en fait sentir.

En guise de conclusion et de leçons sur cette présentation, non exhaustive, des interventions des groupes communistes, il nous appartient de mettre en évidence qu'une fois de plus le camp prolétarien s'est retrouvé, scindé, sur deux côtés opposés dans cet épisode de la guerre de classes. Si l'ensemble des groupes s'est situé dans le sens des intérêts et des nécessités de la lutte, sans concession aux thèmes et à la propagande bourgeoises, sans tomber dans les pièges et fausses perspectives des syndicats et des gauchistes, le CCI lui y est tombé les deux pieds, les deux mains, à plein. A l'exception de son premier tract, celui du 6 mars, il a par la suite repris de manière systématique les thèmes bourgeois (sur la violence des casseurs, les appels à manifester pacifiquement, l'exemplarité de la lutte des étudiants, de l'auto-organisation, la défense de la "liberté d'expression" et du "droit de grève", etc.), leur apportant ainsi du crédit. Il a par ailleurs liquider ouvertement les apports et l'expérience du CCI sur la question de l'extension. Enfin, il a exprimé sa solidarité avec les flics et CRS blessés lors des manifestations. Difficile de faire mieux dans l'opportunisme et la trahison.

Un dernier mot. Cet épisode particulier de la reprise internationale des luttes ouvrières est venu mettre en lumière l'extrême faiblesse des forces communistes, soit en terme militants et d'organisation, soit en terme politique avec la dérive du CCI. L'absence de réelle influence, directe, même si minoritaire, des voix communistes présentant une perspective de classe - contrairement aux années 1970 et 1980 - est sans doute la principale leçon que les communistes doivent tirer et à laquelle ils doivent remédier.

Avril 2006.


Note:

1. L'exposé (publié sur Internet) de la réunion publique du 12 mars, celle-là même où nous avons été physiquement agressés par l'actuel CCI alors que nous allions y diffuser un tract, affirme même que "le silence des médias, la falsification de leurs informations (...) sont une illustration de la trouille de la bourgeoisie".


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