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Nos commentaires (reponse a l'IUPRC)

Paris, le 9 mars 2007.

La fraction interne du CCI à l'IUPRC,

Chers camarades,

Nous avons reçu les Thèses que vous avez adoptées à votre conférence de janvier dernier et nous vous remercions de nous les avoir envoyées. Notre prise de position sur vos Thèses adoptera la même méthode et essentiellement la même évaluation que nous avions déjà réalisée dans les Notes (seulement en espagnol et en français) sur vos documents précédents - Les trois phases..., Une classe ouvrière passive ? - que nous avons publiées dans notre bulletin 37 et que nous vous avons envoyées. Nous espérons que vous pourrez discuter et répondre à cette lettre, et même bien sûr la critiquer, de manière à pouvoir développer un débat et une confrontation politique de nos positions respectives.

Comme vos textes antérieurs, vos Thèses défendent clairement des positions de classe et communistes ce que nous saluons. Elles confirment ce que nous avancions dans nos Notes :

"Nous considérons que le GPRC défend des positions politiques fondamentales qui le placent du côté de ce que nous appelons le camp prolétarien. C'est-à-dire du côté des groupes qui défendent les intérêts et les objectifs révolutionnaires du prolétariat (...). Ces positions du GPRC, véritables frontières de classe, apparaissent, bien que sommairement, dans le texte Les trois phases" (Bulletin 37, Notes sur les textes du GPRC de Russie).

De nouveau, les Thèses défendent :

A travers ses positions, vos Thèses réaffirment deux principes de base du marxisme et du mouvement ouvrier révolutionnaire : la lutte des classes et l'internationalisme. Ces deux principes sont des guides permanents pour l'ensemble de l'activité et de l'intervention des communistes que ces derniers ne peuvent ni oublier, ni même laisser de côté sous aucune raison.

Maintenant, nous avons quelques commentaires critiques et une critique politique principale, qui peut être un important désaccord, que nous voulons et devons vous exposer. Nous vous adressons ces commentaires et ces critiques comme partie d'un débat fraternel et d'une lutte politique au sein du même camp, le camp prolétarien et ils doivent être considérés comme tels.

D'abord, les commentaires critiques : bien sûr vos Thèses sont très courtes. Et donc vous ne pouviez pas développer largement chaque position mise en avant. Si elles sont clairement des positions de classe, il est difficile d'évaluer avec précision comment vous les comprenez et comment vous les défendez. Presque chaque point mériterait une discussion spécifique pour préciser réellement ce qu'il veut dire. Selon nous, leur rédaction actuelle permet à plusieurs positions contradictoires de formellement coexister ce qui peut être politiquement très dangereux si elles ne sont pas discutées plus précisément et en plus grand détail, ni clarifiées dans votre organisation. Nous ne pouvons développer ici mais nous aurons surement l'occasion d'y revenir.

Le second commentaire critique est que plusieurs questions de base ne sont pas mentionnées comme la référence à l'histoire du mouvement ouvrier - organisations révolutionnaires, la révolution d'Octobre, le marxisme, votre propre filiation, etc... Or, pour être capable de défendre de manière conséquente et avec efficacité les positions de classe, nous devons les comprendre dans un cadre historique, c'est-à-dire au travers de l'expérience historique du mouvement ouvrier, et particulièrement et principalement au travers des débats, des luttes politiques, des leçons et de l'expérience de ses organisations politiques révolutionnaires tout au long de son histoire.

Et le troisième commentaire critique est que les Thèses apparaissent, en grande partie, comme déterminées par les spécificités historiques et actuelles de la Russie, l'énorme poids du stalinisme dans ce pays, et de la lutte politique quotidienne que vous devez certainement mener dans cette situation. Nous savons que la Russie est le pays où la contre-révolution, dont l'idéologie principale a été le stalinisme, a été la pire, la plus profonde et la plus longue contre le prolétariat et les minorités révolutionnaires. Et nous savons que c'est certainement l'endroit où elle exerce encore aujourd'hui la pression la plus forte contre le véritable communisme. Soyons clairs : le fait que des camarades ou des groupes défendent encore le communisme dans la Russie actuelle - qui vit un état de guerre permanent avec un Etat extrêmement répressif - et sont en train de se développer et de nouer des liens avec les courants actuels de la Gauche communiste internationale est à saluer fortement. C'est plein de promesses pour le futur et révèle la vitalité toujours existante et la force du prolétariat en Russie. Mais précisément pour cette raison, nous voulons relever et souligner le fait que vos documents en général, et certainement ces Thèses, reflètent cette pression et souffrent de cette faiblesse.

Par exemple, vous ne mentionnez pas la révolution d'Octobre alors qu'implicitement vous vous y référez. Nous supposons que le Parti stalinien, ou les Partis, prétend se revendiquer de la révolution d'Octobre au nom du nationalisme russe et qu'il doit être difficile de défendre l'expérience de la révolution russe d'un point de vue communiste. Mais c'est précisément pour cette raison qu'une lutte encore plus importante et cruciale sur cette question est nécessaire et doit être menée par les groupes révolutionnaires pour disputer aux forces bourgeoises la véritable expérience de classe et le réel héritage de cet événement historique. Sûrement, une partie de l'hésitation évidente que vous avez pour mentionner explicitement la question du Parti révolutionnaire - vous n'utilisez pas le mot - vient comme une conséquence du poids du stalinisme.

Mais c'est justement sur cette question que porte la principale critique politique que nous avons : nous ne l'avions pas formellement mentionnée dans nos Notes même si nous l'avions déjà notée, mais les Thèses presentent une claire tendance conseilliste qui est pour nous une véritable faiblesse politique et représente un réel danger non seulement pour tout groupe, mais pour l'ensemble du camp prolétarien internationaliste. Que qualifions-nous de Conseillisme ? Essentiellement et brièvement, le conseillisme est le courant politique qui sous-estime gravement le rôle et les tâches de l'organisation politique du prolétariat jusqu'à, pour certaines de ses tendances historiques, y dénier totalement toute fonction. Historiquement, il apparaît dans les années 1930 en réaction aux dégénérescences... de la révolution russe et du Parti bolchevique et à l'avènement du stalinisme. Mais il a rapidement rejeté toute l'expérience du Parti bolchevique et a présenté la révolution russe comme une révolution bourgeoise. Théoriquement et politiquement, c'est la version moderne de l'apolitisme anarchiste contre lequel Marx a dû lutter au sein de la 1ère Internationale, du courant économiste que Lénine a combattu dans Que faire ? au moment même où Rosa Luxemburg se confrontait à la politique et à la pratique réformistes et opportunistes des chefs syndicaux dans le débat sur la Grève de masse... Concrètement, le conseillisme tend à réduire la lutte de la classe ouvrière à sa dimension économique, sous-estimant ou niant sa dimension et son contenu politiques cruciaux, c'est-à-dire en déniant tout rôle actif et concret à la conscience de classe et aux minorités communistes au sein desquelles cette conscience de classe est synthétisée et ouvertement défendue.

Cette présentation rapide et incomplète du conseillisme nous permet de voir pourquoi et où, selon nous, les Thèses présentent cette importante faiblesse politique :

Nous ne développons pas plus ici car c'est une question large et cruciale qui a besoin d'un important et sérieux débat. Mais nous sommes particulièrement intéressés à développer la discussion sur cette question spécifique avec vous et nous espérons que ce sera aussi le cas pour vous.

Voilà, chers camarades, nos commentaires fraternels, certains fortement critiques, d'autres appuyant, que nous voulions vous exprimer sans attendre trop longtemps. Nous espérons que vous comprendrez qu'il ne s'agit pas d'un rejet dogmatique et sectaire de discussion avec vous. Bien au contraire. Nous vous appelons à les considérer comme nous le faisons nous-mêmes : un appel au débat et à la confrontation de nos positions respectives. La seule limitation que nous pourrions avoir vis-à-vis de la discussion avec vous serait nos forces limitées. Nous attendons votre réponse.

Nous ne comprenons pas le russe, ni l'allemand. Est-ce que l'anglais est bon pour vous ? Vous nous aviez dit que vous pouviez aussi lire l'espagnol. Est-ce possible ? Quelle langue est-elle la plus accessible pour vous ?

Nous avons vu votre site web. Voulez-vous que nous mettions un lien sur notre propre site ? Acceptez-vous de faire de même pour le nôtre ? Au cas où vous êtes d'accord, voici notre adresse (...)

Seriez-vous d'accord si nous décidons de publier votre texte et notre réponse dans notre bulletin ? Nous vous joignons la traduction en français des Thèses. Elle peut vous être utile. Une fois qu'elles seront traduites en espagnol par nos camarades mexicains, nous vous les enverrons.

Saluts communistes.

La fraction interne du CCI.


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