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DEBAT AU SEIN DU CAMP PROLETARIEN
Commentaires à propos d'un article du BIPR
Effondrement automatique du capitalisme ou révolution prolétarienne

Sous le titre "Pour une définition du concept de décadence", le BIPR a récemment publié, d'abord en italien dans Prometeo 8 de décembre 2003, puis sur son site internet en anglais et en français, un article où il présente ouvertement et succinctement sa position sur le concept de décadence du capitalisme. L'article reconnaît non seulement que ce concept a une "valeur", mais débat de la différence entre une notion claire de la décadence du capitalisme et ce qui serait une "fausse perspective". Il reconnaît explicitement l'existence d'une phase ascendante et d'une autre, décadente, dans le capitalisme.

La valeur du terme de décadence réside dans l’identification des facteurs qui, dans le procès d’accumulation du capital, dans la détermination des crises cycliques, comme pour toutes autres formes d’expression des contradictions économiques et sociales de la société capitaliste, rend tous ces phénomènes plus aigus, moins administrables, jusqu’à mettre toujours plus en difficulté les mécanismes même qui président au processus de valorisation et d’accumulation du capital...

“La recherche sur la décadence conduit soit à identifier les mécanismes qui président au ralentissement du processus de valorisation du capital avec toutes les conséquences que cela comporte, soit à demeurer dans une fausse perspective, vainement prophétique, ou, pire encore, téléologique et privée d’une quelconque vérification objective.”

Nous voulons saluer et souligner l'importance de la publication de cet article car, avec lui, s'ouvre le possibilité d'une discussion sérieuse et profonde des accords et des divergences sur cette question qui, face à la perspective ouverte le 11 septembre 2001, est plus actuelle que jamais et qui exige la plus grande clarification possible de la part des révolutionnaires (1). La meilleure manière de le faire est en exprimant nos réflexions et commentaires critiques et en appelant en même temps les groupes et éléments du camp prolétarien à ce qu'ils participent aussi à ce débat nécessaire (2).

Dans la mesure où divers aspects sont traités, nous commencerons par revenir ici seulement sur la première préoccupation exprimée par le BIPR dans son texte par rapport à une confusion qui a existé dans le camp prolétarien entre la notion de "décadence" et celle "d'effondrement économique" du capitalisme. Donnons la parole au BIPR (nous soulignons) :

Le terme de décadence relatif à la forme des rapports de production et à la société bourgeoise présente des aspects d’une certaine valeur mais aussi des ambiguïtés. L’ambiguïté réside dans le fait que l’idée de décadence ou de progressif déclin de la forme productive capitaliste provient d’une sorte de processus inéluctable d’auto destruction dépendant essentiellement de son être lui-même. Cela peut se comparer aux effets d’autodestruction que dégagent les neutrons en s’écrasant contre les atomes après leur trajectoire imposée ; malgré des forces contradictoires, ils se rapprochent progressivement jusqu’à leur destruction réciproque. L’approche atomique va de pair avec la position téléologique de la disparition et de la destruction de la forme économique capitaliste qui serait un événement historiquement daté, économiquement inéluctable et socialement prédéterminé. Outre une approche infantile et idéaliste, cela finit par avoir des répercussions négatives sur le plan politique, générant l’hypothèse que pour voir la mort du capitalisme, il suffit de s’asseoir sur la berge, ou, au mieux, d’intervenir dans une situation de crise, et seulement celle-ci, les instruments subjectifs de la lutte de classe sont perçus comme le dernier coup de pouce d’un processus irréversible. Rien n’est plus faux. L’aspect contradictoire de la forme capitaliste, les crises économiques qui en dérivent, le renouvellement du processus d’accumulation qui est momentanément interrompu par les crises mais qui reçoit de nouvelles forces à travers la destruction de capitaux et des moyens de production excédentaires, ne mettent pas automatiquement en cause sa disparition.

Ou bien c’est le facteur subjectif qui intervient, dont la lutte de classe est l’axe matériel et historique, et les crises la prémisse économique déterminante, ou bien, le système économique se reproduit, rééditant à un niveau supérieur toutes ses contradictions, sans pour cela créer les conditions de sa propre destruction.” (Pour une définition du concept de décadence, souligné par nous).

Effectivement ! L'idée qu'avec l'entrée dans sa phase de décadence, le capitalisme pourrait s'auto-détruire, s'effondrer par lui-même, sous le poids de ses contradictions purement économiques, en marge de la lutte des classes, a dû être combattue de manière constante tout au long de l'histoire dans le camp marxiste. Nous avons déjà abordé cette question, en passant, dans différentes parties de notre série sur la décadence. Rappelons ici, par exemple, comment Rosa Luxemburg avait déjà dû avertir contre cette interprétation possible de sa théorie :

"Par ce processus, le capital prépare doublement son propre effondrement : d'une part en s'étendant aux dépens des formes de production non capitalistes, il fait avancer le moment où l'humanité tout entière ne se composera plus effectivement que de capitalistes et de prolétaires rendant ainsi impossible toute nouvelle expansion, et donc toute accumulation. D'autre part, dans la mesure où cette tendance s'impose, elle exaspère les antagonismes de classe et l'anarchie économique et politique internationale à tel point que, bien avant que l'évolution économique ait abouti à ses dernières conséquences, à savoir la domination absolue et exclusive de la production capitaliste, surviendra la rébellion du prolétariat international qui en finira nécessairement avec le régime capitaliste " (Rosa Luxemburg, L'accumulation du capital, Critique des critiques 3 ).

"Rosa Luxemburg pousse son raisonnement théorique jusqu'aux limites où toute accumulation serait "impossible". Juste après, comme pour prévenir déjà des fausses conclusions, elle précise que "bien avant surviendra la rébellion du prolétariat international". Ce point limite est seulement un recours théorique, une espèce de "point de mire à l'horizon" inaccessible, dont l'unique sens est de souligner la limite historique du capitalisme. Cela était d'autant plus nécessaire qu'à ce moment-là il fallait combattre la dangereuse théorie du "développement illimité et pacifique" du capitalisme. C'est seulement par la suite, dans d'autres circonstances historiques, celles de la contre-révolution stalinienne, et face à un autre combat politique, celui de la lutte contre la théorie de la "stabilisation" du capitalisme, que s'est développée la théorie de la "chute" du capitalisme, attribuée à tort parfois à Rosa Luxemburg, théorie selon laquelle le capitalisme pourrait s'écrouler, s'effondrer en atteignant un point de la contradiction "économique", sans médiation de la lutte des classes, ce que Rosa Luxemburg rejette explicitement" (Guerre impérialiste ou révolution prolétarienne, Bulletin n°19 de notre fraction, juin 2003).

La "théorie de l'effondrement du système capitaliste" de Grossmann

Mais c'est sûrement, à partir de la seconde moitié des années 1920 et avec notamment l'oeuvre d'Henryk Grossmann, La loi de l'accumulation et de l'effondrement du système capitaliste, qu’a surgi la source principale de confusion entre la notion de "décadence" et celle "d'effondrement économique" du capitalisme.

Grossmann essayait de combattre les théories qui défendaient la possibilité que le capitalisme puisse atteindre une situation d'équilibre, de développement pacifique, illimité et sans crise. Cependant, en faisant cela, il a érigé une théorie particulière qui, malgré son affirmation d'être la première à "reconstruire la méthode et à clarifier le système théorique de Marx", contenait en réalité de profondes déviations tant de la méthode matérialiste-historique que de la théorie sur l'accumulation capitaliste formulée par Marx :

- premièrement en rejetant les développements théoriques antérieurs du camp révolutionnaire par rapport aux limites historiques du capitalisme et à la décadence (particulièrement la théorie de Rosa Luxemburg mais pas seulement) comme de simples interprétations "erronées" de Marx sans essayer de comprendre auparavant leur signification historique, le combat de classe spécifique qu'ils exprimaient, ni la vérité historique relative à une période déterminée qu'ils contenaient ;

- deuxièmement, en déduisant de manière spéculative sa théorie, non du développement historique réel mais d'une nouvelle interprétation des fameux "schémas de la reproduction" de Marx pour ensuite prendre quelques événements réels comme "preuve" de cette théorie. En effet, Grossmann reprend les schémas élaborés par Otto Bauer pour réfuter Rosa Luxemburg et il les continue arithmétiquement durant plusieurs décennies en montrant même qu'à partir de ces schémas on arrive finalement à une paralysie, à un "effondrement" de l'accumulation capitaliste. Avec cette "vérification", Grossmann aurait tout aussi bien pu arriver simplement à la même conclusion que R. Luxemburg : à savoir que le problème du devenir historique du capitalisme ne se résout pas au moyen de l'élaboration d'un quelconque schéma. Au lieu de cela, Grossmann se lance dans l'élaboration de toute une théorie de "l'effondrement du capitalisme" provoqué par un "manque de valorisation par rapport à la sur-accumulation", par une "diminution de la masse de plus-value", ce qui est une pure déduction du schéma qu'il a élaboré. Mais ainsi, il a déplacé le problème crucial de l'économie politique que Marx avait réussi à expliquer de manière critique, c'est-à-dire la baisse tendancielle du taux de profit comme produit de la contradiction fondamentale entre la tendance au développement illimité des forces productives et les rapports de production capitalistes limités par la recherche de bénéfice, l'accumulation ; il a précisément laissé de côté la tendance derrière laquelle on découvre l'existence d'une limite historique du capitalisme ;

- troisièmement, en concluant à partir de sa propre théorie l'effondrement du capitalisme seulement à partir de ses contradictions économiques, Grossman en arrive à ce que l'accumulation devienne "inutile" pour les capitalistes :

"... malgré toutes les interruptions périodiques et toutes les atténuations de la tendance à l'effondrement, avec le progrès de l'accumulation capitaliste, le mécanisme global marche nécessairement vers sa fin. En effet, avec la croissance absolue de l'accumulation de capital, la valorisation du capital généré devient graduellement plus difficile. Si ces tendances contraires arrivent à s'affaiblir ou à se paralyser (...), alors la tendance à l'effondrement devient prédominante et elle s'impose dans sa validité absolue comme «dernière crise»" (H.Grossmann, La loi de l'accumulation et de l'effondrement du système capitaliste, ch.2-VIII, La théorie marxiste de l'effondrement est simultanément une théorie des crises, traduit par nous de l'espagnol, Edition Siglo XXI, 1979)

Cette notion de "l'effondrement économique" se répète tout au long du livre de Grossmann au point qu'elle devient le modèle typique de la conception d'une fin "automatique" du capitalisme même si Grossmann lui-même (et ses défenseurs comme Paul Mattick) essaie de repousser cette notion. Ainsi, dans le dernier chapitre de son livre, il considère effectivement la question de la lutte des classes comme le cadre dans lequel débouche toute la question économique. Cependant, Grossmann réduit la lutte des classes aux augmentations salariales, à la pression qu'exerce la lutte pour les augmentations salariales sur la tendance à l'effondrement économique : la tendance à l'effondrement s'atténue si les salaires baissent et elle s'accélère s'ils montent. Et, dans le même sens, il réduit la signification de la révolution :

"L'objectif final pour lequel la classe ouvrière combat (...) consiste, comme l'indique la loi de l'effondrement mise ici en évidence, dans le résultat produit par la lutte de classes immédiate de tous les jours et dont la matérialisation se voit accélérée par ces luttes" (idem, Considérations finales).

C'est-à-dire que la lutte pour les salaires ("la lutte immédiate de tous les jours") "accélère la matérialisation" de l'effondrement économique du capitalisme. En fin de compte, Grossmann réduit la lutte des classes (une fois celle-ci déjà réduite à la lutte pour les salaires) à une variable au sein de sa théorie économique de l'effondrement, et cela jusqu'à la révolution. Il ne nie pas "la question politique qui concerne le pouvoir", il ne nie pas la nécessité de la révolution prolétarienne, mais il les identifie "simplement" à l'effondrement économique. Il les dilue dans ce dernier. Mais alors comme le signale le BIPR :

"Outre une approche infantile et idéaliste, cela finit par avoir des répercussions négatives sur le plan politique, générant l’hypothèse que pour voir la mort du capitalisme, il suffit de s’asseoir sur la berge, ou, au mieux, d’intervenir dans une situation de crise, et seulement celle-ci, les instruments subjectifs de la lutte de classe sont perçus comme le dernier coup de pouce d’un processus irréversible".

Le courant "conseilliste" et la théorie de l'effondrement

La théorie de Grossmann a été au centre de discussions importantes dans le camp prolétarien des années 1930, spécialement au sein du courant des communistes de conseil.

Anton Pannekoek la rejeta et la critiqua non seulement du point de vue théorique mais aussi de méthode. Selon Pannekoek, Grossmann maintient une position mécaniste dans laquelle les lois sociales économiques s'imposent sur les hommes comme si elles étaient un "pouvoir surhumain" indépendant. Pour Marx par contre, il existe un rapport dialectique entre les lois et les nécessités sociales et la volonté et l'action des hommes :

"Pour Marx, le développement de la société humaine, c'est-à-dire aussi du développement du capitalisme, est déterminé par une nécessité de fer, semblable à une loi naturelle. Mais ce développement est à la fois l'oeuvre des hommes qui y jouent un rôle, chacun déterminant ses actions de manière consciente et intentionnée, même si ce n'est pas avec une conscience de la totalité sociale (...). Toute nécessité sociale s'impose au travers des hommes ; cela signifie que la pensée, la volonté et l'action humaine (...) sont déterminées complètement par l'effet du milieu ambiant ; et c'est seulement au travers de la totalité de ces actions humaines déterminées principalement par les forces sociales que s'impose une soumission à la loi dans le développement social" (A. Pannekoek, La théorie de l'effondrement du capitalisme, Rätekorrespondenz n°1, 1934, traduit par nous de l'espagnol dans ¿ Derrumbe del capitalismo o sujeto revolucionario ?, Editions Siglo XXI, Cuadernos de Pasado y Presente nº 78).

En d'autres termes, si les rapports de production que les hommes établissent entre eux, constituent l'axe du développement social, les rapports sociaux ne se réduisent pas à ces rapports de production, ni ne sont les seuls qui les déterminent. Tous y interviennent, en particulier les rapports politiques, la lutte des classes. Contre la "la déduction que le capitalisme doit s'effondrer du point de vue purement économique dans le sens où - indépendamment des interférences et des révolutions des hommes - il ne peut subsister comme système économique", Pannekoek définit l'effondrement du capitalisme comme rien d'autre que comme le résultat de la révolution prolétarienne :

"L'économie comme totalité des hommes qui travaillent et peinent pour leurs nécessités vitales, et la politique (au sens large) comme totalité des hommes qui opèrent et luttent comme classe pour leurs nécessités vitales, constituent un milieu unique qui se développe selon des lois précises. L'accumulation du capital, les crises, la paupérisation, la révolution prolétarienne, la prise de possession du pouvoir par la classe ouvrière, forment ensemble une unité indivisible qui agit comme loi naturelle : l'effondrement du capitalisme" (A. Pannekoek, idem).

Pour sa part, Paul Mattick, en défendant le livre de Grossmann, ne rejette pas seulement la critique qui lui est faite sur un "effondrement pour des raisons purement économique" et "indépendamment de l'intervention humaine", mais il réaffirme que "l'analyse de l'accumulation capitaliste débouche sur la lutte de classes" et que la fin du capitalisme sera le produit de la révolution prolétarienne. Il va même jusqu'à reprendre la notion de R. Luxemburg, entre la perspective d'arriver à un point où l'accumulation devient "impossible" et la réalité historique dans laquelle surviendra "bien avant" la révolution prolétarienne :

"La reconnaissance théorique que le système capitaliste, à cause de ses contradictions internes, doit nécessairement aller vers l'effondrement, n'induit absolument pas de considérer que l'effondrement réel soit un processus automatique, indépendant des hommes (...). Avant que le «point limite» obtenu théoriquement sur la base d'un ensemble d'abstractions, ne rencontre son parallèle dans la réalité, les ouvriers auront déjà réalisé leur révolution" (P. Mattick, Sur la théorie marxiste de l'accumulation et de l'effondrement, Rätekorrespondenz n°4, 1934, idem, traduit par nous de l'espagnol).

En réalité, Mattick développe ici un position politique qui lui est propre et dans laquelle il se sépare de Grossmann puisque, pour ce dernier, "l'effondrement économique" n'est pas un "point limite théorique" distinct de la "révolution" comme l'affirme Mattick. Au contraire, c'est le point où précisément coïncident, s'identifient, "l'impossibilité de continuer l'accumulation" et le passage du contrôle de la société dans les mains du prolétariat.

Ainsi donc, le fond du débat entre Pannekoek et Mattick sur l'oeuvre de Grossmann ne repose pas sur la possibilité, ou non, d'un "effondrement automatique" du capitalisme puisque les deux, outre qu'ils rejettent explicitement cette notion, réaffirment clairement que la fin du capitalisme n'arrivera qu'avec la révolution prolétarienne. Leur divergence réelle se centre par contre justement sur les conditions de celle-là, sur les conditions pour le développement de la lutte et de la conscience révolutionnaire du prolétariat.

P. Mattick reproche à Pannekoek de faire abstraction des conditions matérielles nécessaires pour que s'ouvre une situation révolutionnaire, un cours vers la prise révolutionnaire du pouvoir de la part du prolétariat : des conditions de crise profonde, sans issue, du capital qui amèneraient à une paupérisation insupportable des masses travailleuses lesquelles se verraient poussées à une lutte définitive contre le capital - condition que Mattick, reprenant les concepts de Grossmann, appelle "tendance ou début de l'effondrement". Et en effet, pour le Pannekoek des années 1930, les situations catastrophiques du capitalisme (les crises, les guerres), bien qu'elles poussent à la "perte d'illusions" sur une possibilité d'amélioration dans le cadre du capitalisme et à la lutte de classe du prolétariat, ne sont qu'une constante du capitalisme qui détermine en dernière instance l'ouverture d'un cours vers la révolution. Le déterminant, selon Pannekoek, est la prise de conscience, "l'auto-éducation" des masses prolétariennes :

"Que la crise actuelle, si profonde et néfaste comme aucune autre auparavant, ne montre aucune preuve d'un réveil de la révolution prolétarienne, semble être une contradiction. Mais la suppression de vieilles illusions est sa première grande tâche (...). La classe ouvrière elle-même, comme masse, doit diriger la lutte et doit s'adapter aux nouvelles formes de lutte (...). Et bien que cette crise puisse diminuer, de nouvelles crises et de nouvelles luttes devront survenir. Dans ces luttes, la classe ouvrière développera sa combativité, elle trouvera ses objectifs, elle s'éduquera, elle deviendra indépendante et apprendra à prendre dans ses propres mains son destin, c'est-à-dire la production sociale (...). L'auto-libération du prolétariat est l'effondrement du capitalisme" (Pannekoek, idem).

Au contraire, pour Mattick, c'est précisément la tendance à l'effondrement économique du capitalisme, à l'aggravation des conditions de vie du prolétariat, qui conduira, de manière naturelle, spontanée (nous pourrions même dire mécanique) à la lutte révolutionnaire de la classe :

"Les luttes de classes dépendent de la position de classe du prolétariat. Elles auront toujours et nécessairement un caractère économique. Ce ne sera pas avant que commence l'effondrement, c'est-à-dire quand le capital ne peut continuer à exister qu'uniquement sur la base de la paupérisation absolue et continuelle des masses, quand cette lutte économique se transforme, que cela soit conscient ou non pour les masses, en lutte politique qui pose la question du pouvoir (...). La révolution s'impose aux hommes au travers de cette situation économique" (P. Mattick, idem).

Et ainsi, alors que pour Pannekoek la conscience de classe est le déterminant, pour Mattick au contraire la conscience de classe est simplement un produit, un reflet des conditions matérielles et de l'activité spontanée des masses. Et elle ne joue en propre aucun rôle actif dans la transformation des luttes "économiques" en luttes "politiques". Pour Mattick, la révolution surgit uniquement de la "nécessité" économique de laquelle la conscience n'est simplement qu'un reflet passif :

"... la conscience doit s'imposer en fin de compte. Mais sous de telles conditions [sous le capitalisme] elle ne peut le faire qu'en se concrétisant. Les hommes font par nécessité ce qu'ils feraient par volonté propre sous des relations libres (...). L'insurrection des masses ne peut se développer de "l'intellect-concience" ; les conditions capitalistes de vie écartent cette possibilité puisque la conscience est en fin de compte toujours celle de la pratique existante. Et cependant, les nécessités matérielles des masses les poussent à des actions comme si elles étaient réellement éduquées révolutionnairement ; elles deviennent «conscientes des faits». Leurs nécessités vitales n'ont d'autre possibilité d'expression que révolutionnaire. L'action révolutionnaire du prolétariat ne peut être expliquée par d'autres motifs que ceux de ses nécessités matérielles vitales. Mais celles-ci dépendent de la condition économique de la société. Si le capital n'a pas de limite objective, alors on ne peut pas non plus compter sur une révolution" (P.Mattick, idem).

D'un côté, Pannekoek arrive à la conclusion que la notion "d'effondrement économique" n'est rien d'autre qu'un autre subterfuge pour introduire la justification de la nécessité d'un parti qui dirige les masses prolétariennes car, à partir de cette notion, on tend à accepter que le soulèvement révolutionnaire pourrait avoir lieu sans que les masses prolétariennes aient "mûris révolutionnairement", c'est-à-dire sans la nécessité d'être arrivées à la conscience de classe. Il suffit alors qu'un parti prenne le pouvoir en leur nom :

A partir de la théorie de Grossmann, on peut déduire que la révolution "est indépendante de leur maturité révolutionnaire [des ouvriers], de leur capacité à prendre en main eux-mêmes le contrôle ["dominio" dans la version espagnole] sur la société et de le maintenir. Cela signifie qu'un groupe révolutionnaire, qu'un parti avec des objectifs socialistes doit émerger comme nouvelle autorité ["dominio" de nouveau dans la version espagnole] à la place de l'ancienne..." (Pannekoek, idem).

D'un autre côté, Mattick conclut que la paupérisation absolue qui accompagne "l'effondrement économique" serait suffisante pour l'ouverture d'un cours révolutionnaire puisque la conscience serait seulement quelque chose de postérieur et de passif, un reflet de l'activité propre des masses laquelle surgirait de la pure "nécessité" économique.

Ainsi derrière la polémique sur "l'effondrement", nous voyons donc comment, au sein du courant "conseilliste", s'est séparé idéologiquement le rapport dialectique existant entre les conditions matérielles ("économiques") et les conditions d'organisation et de conscience ("politiques") indispensables pour l'ouverture d'un cours vers la révolution. Mais, comme le signalent à juste titre les camarades du BIPR :

Ou bien c’est le facteur subjectif qui intervient, dont la lutte de classe est l’axe matériel et historique, et les crises la prémisse économique déterminante, ou bien, le système économique se reproduit, rééditant à un niveau supérieur toutes ses contradictions….”

La nouvelle théorie du CCI sur "l'effondrement automatique du capitalisme"

Nous ne pouvons terminer ce rapide survol des théories de "l'effondrement" sans évoquer la théorie sur la "décomposition sociale" que défend l'actuel CCI. Nous ne prétendons pas revenir ici sur la critique générale de cette théorie que nous avons déjà abordée en plusieurs occasions (4). Ici, nous voulons juste attirer l'attention sur comment cette théorie, dans la mesure où elle s'est convertie en étendard d'une organisation dégénérescente, est devenue chaque fois plus une théorie aux caractéristiques analogues à celles des théories de l'effondrement du passé.

Exprimée de manière générale, cette théorie défend que, face à l'impasse historique à laquelle sont arrivées les deux classes fondamentales de la société capitaliste, la bourgeoisie et le prolétariat, la persistance de la crise économique ouvre alors la voie à une phase "terminale" de la décadence du capitalisme. L'impasse historique est due au fait que les deux classes sociales, le prolétariat arrivant à freiner l'éclatement d'une nouvelle guerre impérialiste mondiale mais restant en même temps incapable d'élever ses luttes au niveau d'un mouvement révolutionnaire international, se bloquent mutuellement le passage à leur solution historique respective à la crise économique chronique du capitalisme. La phase "terminale" de la décadence mène alors à une décomposition croissante du tissu social, à une désagrégation croissante des rapports sociaux dans tous les domaines et dans toutes les classes, au "chacun pour soi", au chaos, à l'irrationnalité et aux calamités de tous type (terrorisme aggravé et sans contrôle, guerres et conflits régionaux, catastrophes provoquées par des phénomènes naturels, famines, épidémies, gangstérisme, etc...). Mais les conséquences les plus importantes de la décomposition se situent au plan des classes sociales. D'un côté, la tendance au chacun pour soi au sein de la bourgeoisie ouvre la possibilité que celle-ci ne réussisse plus à s'organiser en "blocs" impérialistes ce qui ferme définitivement l'alternative d'une nouvelle guerre mondiale ; de l'autre, l'influence de la décomposition au sein du prolétariat amène au danger que celui-ci perde définitivement ses capacités pour s'unifier, pour prendre conscience et étendre sa lutte révolutionnaire, ouvrant le passage à une troisième "voie" : la fin de l'humanité au travers de la décomposition.

Il est certain que la théorie de la décomposition contient dès son origine un élément "effondrement" : la possibilité que le capitalisme (et avec lui l'humanité entière) arrive à sa fin non comme produit de la lutte des classes mais comme produit de la prolongation indéfinie et sans issue de la crise, de la simple impossibilité de continuer à aller de l'avant comme système. Cependant, il faut noter qu'au début - et durant des années - au côté de la notion de la "décomposition", le CCI a maintenu - de manière contradictoire - l'analyse marxiste "classique" de la crise, des luttes impérialistes et de la lutte des classes. Ainsi par exemple, dans les thèses de 1990 sur la décomposition, celle-ci était encore considérée comme un phénomène de la "superstructure", c'est-à-dire comme un "effet", alors que la crise économique apparaissait encore comme le facteur déterminant de la situation sociale : "La crise économique, contrairement à la décomposition sociale qui concerne essentiellement les superstructures, est un phénomène qui affecte directement l'infrastructure de la société sur laquelle reposent ces superstructures ; en ce sens, elle met à nu les causes ultimes de l'ensemble de la barbarie qui s'abat sur la société, permettant ainsi au prolétariat de prendre conscience de la nécessité de changer radicalement de système..." (La décomposition, phase ultime de la décadence du capitalisme, Thèse 17, Revue internationale 62, 1990, souligné par nous).

Actuellement, par contre, le CCI n'est pas seulement arrivé à la conclusion que la décomposition s'est convertie en "facteur décisif de l'évolution de la société" ou encore qu'elle"soit le facteur central de l'évolution de toute la société" mais que "la décomposition signifie un lent processus d'anéantissement des forces productives jusqu'à un point où la construction du communisme devient désormais imposssible" (Les racines marxistes de la notion de décomposition, Revue internationale 117, 2004, souligné par nous) (5).

Là, le CCI ne se réfère pas à la destruction des forces productives que provoque la crise capitaliste, mais au capitalisme comme un tout dans la phase de Décomposition dans laquelle il serait entré. Il se réfère à un processus général qui "conduit de manière lente mais irréversible à la destruction de l'humanité" :"le processus de destruction de l'humanité, sous les effets de la Décomposition, bien que lent et sournois, est irréversible" (idem). C'est-à-dire que pour le CCI le mode de production capitaliste n'implique plus maintenant une tendance au développement des forces productives. Mais tout le contraire. Il implique un processus de destruction des forces productives. Ainsi, l'actuel CCI nie sa propre théorie de la décadence qui, rejetant la thèse de Trotsky selon laquelle "les forces productives de l'humanité ont cessé de croître", défendait que "les blocages absolus de la croissance des forces productives apparaissent bien au cours des phases de décadence. Mais, (dans le système capitaliste, la vie économique ne pouvant pas exister sans accumulation croissante et permanente du capital), ils ne surgissent que momentanément" (Brochure du CCI sur La décadence du capitalisme, ch. Quel développement des forces productives ?, souligné dans la version originale).

Mais avec sa nouvelle définition, le CCI actuel ne nie pas seulement sa théorie de la décadence mais il rejette aussi, simplement, ni plus ni moins, que la contradiction fondamentale du capitalisme telle qu'elle fut énoncée par Marx lui-même pour qui cette contradiction consiste en ce que "le système de production capitaliste implique une tendance à un développement absolu des forces productives (...) tandis que, par ailleurs, le système a pour but la conservation de la valeur-capital existante et sa mise en valeur (...). Les limites qui servent de cadre infranchissable à la conservation et la mise en valeur de la valeur-capital (...) entrent donc sans cesse en contradiction avec les méthodes de production que le capital doit employer nécessairement pour sa propre fin, et qui tendent à promouvoir un accroissement illimité de la production, un développement inconditionné des forces productives sociales du travail (...)" (K.Marx, Le Capital, Tome III, ch. XV, Conflit entre l'extension de la production et la mise en valeur, Editions Sociales, souligné par nous).

Dans le même sens, à l'origine le CCI était capable d'analyser et de reconnaître, au niveau de la vie de la bourgeoisie, qu'existaient à la fois "la tendance au chacun pour soi et au chaos" et la tendance à la formation à un nouveau jeu de blocs impérialistes comme tendances contradictoires agissant simultanément. Aujourd'hui, en échange, le CCI glisse chaque fois plus l'idée que les grandes puissances ne se dirigent plus vers une guerre impérialiste généralisée mais qu'elles seraient de plus en plus - et en premier lieu les Etats-Unis - les principaux promoteurs de la paix et de l'ordre social par leurs tentatives de prévenir la chute des pays et régions de la périphérie du capitalisme dans le chaos et les guerres locales. C'est ainsi qu'il ouvre les portes grandes ouvertes à l'opportunisme, c'est-à-dire à une politique de collaboration des classes.

Et finalement, par rapport au prolétariat, alors qu'à l'origine la décomposition signifiait "des difficultés supplémentaires" pour sa lutte, maintenant le CCI développe toujours plus la notion de "perte d'identité" de la classe ouvrière pour introduire l'idée qu'avec la décomposition, nous serions entrés dans une phase de désagrégation et de démembrement de la classe ouvrière, secteur après secteur, c'est-à-dire dans un processus de disparition pratique de la classe ouvrière comme telle.

Finalement, l'érosion des fondements du marxisme dans le domaine "économique" a sa contrepartie dans leur érosion aussi dans le domaine "politique" :

"La décomposition oblige le prolétariat à affûter les armes de sa conscience, de son unité, de sa confiance en lui-même, de sa solidarité, de sa volonté et de son héroïsme (...)" affirme le CCI d'aujourd'hui. Cependant, selon ce même CCI, la décomposition produit exactement le contraire : “les effets de la décomposition ont un impact profondément négatif sur la conscience du prolétariat, sur son sens de lui-même comme classe (...). Ils servent à atomiser la classe, à accroître les divisions en son sein, et à la dissoudre (...)" (Les racines marxistes de la notion de décomposition, Revue internationale 117).

Comment donc peut-on dire que "la décomposition oblige le prolétariat à affûter les armes de sa conscience", etc... ? Quand, par exemple, le marxisme (et avec lui, le "vieux" CCI) affirme que la crise, en aggravant les conditions de vie du prolétariat, "l'oblige" à se soulever, à lutter, il exprime une nécessité objective, produit des conditions matérielles mêmes du capitalisme. Par contre, maintenant, quand le CCI affirme que "la décomposition oblige le prolétariat à affûter les armes de sa conscience", il n'exprime pas une nécessité objective. Ce qu'il exprime est simplement le désir du CCI lui-même que le prolétariat "affute les armes de sa conscience" etc., désir qui cependant n'a aucune substance matérielle (car selon le CCI lui-même ce qui produit la décomposition de manière objective est précisèment tout le contraire). Ainsi, le CCI rabaisse le déterminisme historique à un simple impératif moral.

Toute cette "évolution" de la théorie de la décomposition au sein du CCI, et en particulier ces dernières années, ne peut pas s'expliquer que comme un simple reflet de la multiplication et de l'extension des phénomènes qu'il essaie d'expliquer. Il est vrai qu'à la fin des années 1980, nous avons assisté effectivement à une période "d'impasse historique" qui a été confirmée par la chute du bloc impérialiste de l'Est. Avec elle, non seulement le danger d'une troisième guerre mondiale s'est éloigné momentanément mais, surtout, le prolétariat, sans aller néanmoins jusqu'à souffrir une défaite historique de l'ampleur de celle qu'il vécut à partir de la moitié des années 1920, est entré dans une période de confusion, de démoralisation et de recul de ses luttes comme produit de l'implosion du bloc de l'Est et de la campagne développée par la bourgeoisie sur "la fin du communisme", "la victoire finale de la démocratie" et "la fin de l'histoire". Et c'est dans l'interprétation de cette période que se trouve l'origine et l'explication de la théorie de la "décomposition sociale".

Cependant, et spécialement à partir de 2001 (marqué par la destruction des Twin Towers de New-York), avec la nouvelle expression ouverte d'une tendance à la bipolarisation impérialiste et à la guerre généralisée d'un côté, et de l'autre côté avec des manifestations par le prolétariat d'une reprise internationale de ses luttes de classe (Argentine, France, Grande-Bretagne, Italie...), c'est-à-dire avec le retour sur le devant de la scène historique de l'alternative de "guerre ou révolution", il est notoire que le CCI non seulement n'a plus été capable d'analyser ce changement, ni de reconnaître que "l'impasse historique" ne pouvait qu'être momentanée, mais il en arrive même au point de nier - et même de cacher consciemment et volontairement - ces expressions de l'alternative historique de classe et d'abandonner de plus en plus jusqu'aux notions de base du marxisme pour, en échange, soutenir, introduire et imposer la théorie de la décomposition même si celle-ci se révèle chaque fois plus sans consistance et absurde.

Ainsi, tout comme dans les autres cas de théories de "l'effondrement", la prédominance dogmatique de la théorie de la "décomposition" au détriment de l'analyse marxiste, ne s'explique pas seulement par les conditions sociales "objectives", et encore moins quand ces dernières tendent à changer et à démentir de plus en plus clairement la théorie qui essayait de les expliquer. Cela se comprend seulement par les difficultés internes de l'organisation au sein de laquelle a surgi cette théorie, par la perte de capacité de critique et d'analyse, car en son sein existent des obstacles pour mettre en question cette théorie et, finalement, parce que cette théorie s'est transformée en un instrument pour justifier une orientation, un positionnement et une attitude politiques déterminés.

Il est notable que l'attitude politique du CCI actuel présente aussi certaines analogies avec celle des vieux "conseillistes". En effet, les conseillistes considéraient que la classe ouvrière n'avait pas besoin d'une organisation politique qui l'oriente, qui la dirige politiquement (ou, en dernière instance comme dans le cas de A. Pannekoek, ils réduisaient le rôle des révolutionnaires à une espèce d'éducateurs ou de conseillers), position qui comportait en soi la dissolution des organisations conseillistes elles-mêmes. Pour sa part, le CCI actuel adopte chaque fois plus une attitude de passivité et de mépris vis-à-vis des luttes ouvrières qui nie implicitement sa fonction comme facteur actif d'orientation et d'impulsion au sein de la classe ouvrière (ou qui reduit son rôle à "cultiver et développer en profondeur et en extension ces qualités" [(sic) Les racines marxistes de la notion de décomposition, idem] de la classe ouvrière pour contrecarrer les effets de la décomposition) ce qui contient en soi sa liquidation à terme. Et il est certain comme le signale le BIPR que tant la théorie de "l'effondrement" que celle de la "décomposition" finissent "par avoir des répercussions négatives sur le plan politique, générant l’hypothèse que pour voir la mort du capitalisme, il suffit de s’asseoir sur la berge".

Finalement, la théorie de la "décomposition sociale" a gagné aussi le domaine du fonctionnement de l'organisation des révolutionnaires. Selon elle, la décomposition sociale contient aussi une tendance des militants à se laisser entraîner par l'individualisme et l'idéologie bourgeoise en général, à former des clans et des bandes au sein de l'organisation ; c'est la raison pour laquelle la théorie de la décomposition qui s'est introduite et domine le CCI ces derniers années, a aussi servi, avant tout, à justifier la politique de type "bolchévisation", disciplinaire, de "laminage" des opinions divergentes, d'étouffement des débats et d'interdiction des oppositions (fractions) sous le prétexte du combat contre les "clans" et les "éléments troubles". Ainsi, comme dans les autres théories de "l'effondrement", derrière la théorie de la décomposition on découvre la tendance à la liquidation - sous une forme ou sous une autre - de l'organisation révolutionnaire.

Juin 2004


Notes:

1. C'est ce que nous avons essayé de montrer dans la série d'articles sur l'histoire de la théorie de la décadence publiée dans notre bulletin (n°19, 20, 22 et 24).

2. Cette nécessité est ressentie dans le camp prolétarien comme le prouve non seulement le récent débat autour du CCI (le NCI d'Argentine, le groupe russe) mais aussi la publication récente d'autres articles sur le sujet par d'autres groupes ou individus.

3. Il y a de substantielles différences entre la version française de ce livre (édition Maspéro) et la version espagnole (édition Grijalbo). Cette dernière est moins "absolue" et plus précise, nous semble-t-il. Nous avons donc directement traduit ce passage de la version espagnole.

4. Voir par exemple L'évolution aléatoire de ce qui fut une organisation marxiste (et donc déterministe), bulletin 21 de notre fraction, octobre 2003, Guerre impérialiste ou révolution prolétarienne : la décadence du capitalisme et le marxisme (4e partie) et Contresens dans la théorie de la décomposition et les pas du CCI vers l'opportunisme, bulletin 24, avril 2004.

5. Cet article qui prétend asseoir ‘les racines marxistes de la décomposition’, essaie de colmater les brèches révisionnistes ouvertes par la Résolution du 15è Congrès sur la situation internationale et que nous avons mises en évidence (cf. notre bulletin 21). Notre critique a semé un certain trouble parmi de nombreux militants et sympathisants du CCI. L’illustre liquidationniste qui a rédigé l’article se voit donc contraint, afin de tenter de couper court à la critique, d’affirmer que "le marxisme a toujours posé en termes d’alternative le dénouement de l’évolution historique" et que "plus que jamais, la lutte de classe du prolétariat est le moteur de l’histoire". Cela ne mange pas de pain et satisfera les adeptes de la faction familiale. Mais la résolution du congrès est toujours là et n’a pas été corrigée par le 16è Congrès de RI qui vient de se tenir. Et surtout, comme notre lecteur va pouvoir s’en rendre compte dans cette partie de notre texte, la dérive opportuniste au plan théorique et la révision des positions marxistes continuent de plus belle dans l’article de la Revue internationale. En essayant de colmater certaines brèches opportunistes, il en ouvre de nouvelles. L’assise marxiste de la notion de décomposition est plus que chancelante dès le premier des articles de la série annoncée sur le sujet.


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